Un an jour pour jour après avoir quitté le sol européen, nous y atterrissons dans un contexte particulier.


Quitte à rentrer alors qu'on ne le voulait pas et qu'on n'était pas prêt, un réconfort aurait été de pouvoir retrouver nos familles et amis, mais nous rentrons pour nous retrouver enfermés et sans pouvoir revoir nos proches. Nous ne sommes pas les plus à plaindre : nous avons des parents pour nous accueillir et nous héberger dans de belles maisons avec jardin.


La bonne nouvelle dans ces mauvaises nouvelles, c'est qu'après avoir quitté l'Amérique de manière très brusque, nous allons avoir l'occasion de réatterrir en douceur : notre avion se pose à Francfort et nous pouvons rentrer en vélo jusqu'à chez nous. Ce qui nous laisse quelques jours pour profiter de nos derniers moments de liberté avant on ne sait quand.

Alors qu'on remonte nos vélos dans l'aéroport, 10h du matin heure locale mais 3h du matin pour nous, une chambre à air pète de manière irréversible : la pipette est foutue, il ne manquait plus que ça ! En ces temps de confinement, on espère trouver un magasin de vélo ouvert dans les environs pour nous sauver. Heureusement les règles en Allemagne sont un peu plus souples qu'en Belgique et on trouve ce qu'il nous faut. En contre-partie, on se régale avec de bonnes patisseries qui sont de loin bien meillleures qu'en Amérique. On a aussi une belle surprise: un marchand de donuts nous en offre 6 plus 2 boissons ! Comme quoi, pas besoin d'aller à l'autre bout du monde pour rencontrer de belles personnes pleines de générosité.


Nous sommes autorisés à rentrer chez nous à vélo mais ne pouvons pas trop traîner en chemin. Étant donné qu'on ne sait pas dans quelle mesure on peut nous embêter par rapport à ça, on se met en route directement, avec le décalage horaire et sans avoir beaucoup dormi dans l'avion.

Même si bien entendu, on aurait souhaité ne pas devoir rentrer et poursuivre notre rêve, on trouve quand même l'Allemagne bien belle, bien verte en plein printemps et contrastant avec la saison sèche d'Amérique centrale. C'est un plaisir de retrouver des pistes cyclables dignes de ce nom ! Par contre, en terme de température, on a perdu une vingtaine de degrés et nos corps on du mal à s'y réacclimater. On remet nos pulls qui commençaient à prendre la poussière !



C'est une bonne chose de pouvoir rentrer en pédalant, mais tout ce qui est campings et hotels sont bien entendu fermés. Et ce n'est pas dans les conditions actuelles qu'on va aller demander à dormir chez l'habitant. Une seule solution donc: le camping sauvage, ce qui n'est pas pour nous déplaire. Bien que ce soit normalement interdit, on vous avoue que ça nous avait manqué de camper en pleine nature, les dernières fois remontant à la Baja California et on est tout contents de le faire à nouveau.

Nos premiers jours, on roule le long du Rhin. Facile, plat, sans traffic. C'est quand même cool et ça nous change. On passe à côté de jolis châteaux, de beaux villages médiévaux et de maisons à colombage, un point fort de l'Europe avouons-le. Et encore une fois, un changement radical pour nous.


On quitte ensuite le Rhin pour remonter sur les plateaux et dans les champs.

Peut-être vous êtes-vous demandé "mais si ils ne font que du camping sauvage, comment font-ils pour se laver?" Eh bien, pendant 4 jours, on ne s'est tout simplement pas lavé, bien qu'on ait hésité à se laver dans le Rhin. Jour 4, nous passons à côté d'un petit cours d'eau fait pour nous: on s'arrête, et enfilons nos maillots au bord de la piste cyclable avant de se mettre à l'eau pour notre bain de la semaine. Nous sommes un peu déçus car, à l'exception de l'un ou l'autre, les cyclistes et piétons qui passent à côté de nous font plutôt semblant de ne pas nous voir alors qu'on se lave du bout des cheveux à la plante des pieds.



Voila, nous sommes en Belgique. Pour ceux qui se demandent si nous avons eu des problèmes à la frontière: non, pas un policier ni douanier n'a pointé le bout de son nez et pour cause: à cette frontière, il n'y a pas de route pour les voitures, juste un Ravel qui commence.


On continue d'avancer dans les beaux paysages occidentaux, place aux Hautes Fagnes maintenant. On fait un petit crochet par le point le plus haut du pays, nous avons nommé le signal de Botrange, haut de ses 694m!!! Même pas fatigués! Mais déçus car il n'y a même pas une petite pancarte pour signaler que nous sommes au point culminant de la Belgique.



Pour notre première nuit dans notre fière nation, nous plantons notre tente près de Spa, dans le parc d'un centre de revalidation. La grande tante de Thomas y est justement hospitalisée et nous en profitons pour lui faire un coucou revisité, à travers la vitre du centre. Nous avons demandé l'autorisation pour camper ici mais vers 21h, de grosses lampes torches nous aveuglent : police ! Des voisins les ont appelés pour dénoncer la présence de 2 campeurs en ces temps de confinement. Bien que notre histoire les surprenne et soit plutôt atypique, ils inspectent nos passeports et les tampons des frontières faisant foi, nous sommes dans nos droits et ils nous laissent dormir en paix.


La nuit suivante, c'est à Bouge que nous nous arrêtons pour camper dans le jardin de nos chers amis Morgane et Sylvain (Feliz Navidad!!). Ce sont des retrouvailles particulières car, respectant toujours les règles de confinement, nous restons loin l'un de l’autre, nous nous lavons dans leur jardin au tuyau d'arrosage (avertissement: l'eau froide de la région de Namur est TRES froide!) et même les besoins se font dehors, dans la haie ! Même si on aurait aimé les serrer dans nos bras, on est bien contents de les retrouver.

Et voilà, il ne nous reste plus que un petit jour de pédalage avant que ce soit vraiment fini, du moins temporairement. Le mercredi 8 avril au soir, nous arrivons chez les parents de Manon qui nous accueillent pour le confinement. Bien que nous aurions préféré des retrouvailles dans d'autres conditions, nous sommes malgré tout heureux de les retrouver.


Maintenant que nous sommes rentrés, pas question que notre projet se finisse comme cela! Nous sommes en quête de nouveaux projets pour poursuivre notre aventure. Et nous avons déjà pas mal d'idées, leur réalisation dépendra par contre de l'évolution de la situation. En Belgique, en France ou ailleurs en Europe, on a déjà hâte de reprendre notre odyssée !


Pour la petite anecdote, lors de nos quelques jours de vélo en Europe, les gens croisés ne réagissaient pas quand on disait qu'on avait pédalé de l'Alaska au Nicaragua mais il étaient très impressionnés de savoir que l'on reliait Francfort à la Belgique à vélo! (A savoir, 14200km vs 500km)


Ps: quel fut, après les pâtisseries, la première chose que l'on voulut manger?? Des frites une fois!!!


Francfort - Ottignies en chiffres :


-Nombre de jours de vélo : 6

- Nombre de kilomètres roulés : 488km

- Nombre d'heures en selle: 27 heures et 50min

- Dénivelé positif : 3273m

-Altitude maximale: 694m

-vitesse maximale: 55,77 km/h