La Cassiar Highway, par où commencer ? Par sa route et ses paysages ou par toutes les rencontres qu'on y a faites ?

Pendant près de 800km, nous avons roulé entourés de montagnes, lacs et sapins -> pas de doutes possible, nous sommes bien au Canada !

Il a fait plutôt nuageux et on avait au minimum une averse par jour en moyenne mais ça n'empêche pas la route d'être belle et de l'apprécier. Sans être trop fréquentée, elle est plus étroite et sinueuse que l'Alaska Highway : on ne qualifierait pas ça de "highway" mais plutôt de route de campagne ! C'est aussi la route des ours : on a du en voir 25 ou 30! Parfois de loin, parfois à quelques petits mètres de nous. Mais rassurez-vous, ils ont plus peur de nous que des voitures et la plupart du temps, ils s'enfuient sur notre passage. En plus des ours, les animaux qu'on a le plus vu sont... Les moustiques. Et eux n'ont pas peur de nous malheureusement. Certains soirs, on s'enfermait dans la tente pour manger pour avoir la paix.

En terme de vélo, on a plutôt la pêche, on roule bien et notre moyenne est de plus de 90km par jour. Avec une journée record de 121km et 11 ours croisés le même jour.

Mais parlons aussi de toutes ces rencontres qui font la joie de notre voyage et pour lesquelles le vélo est sûrement à de nombreuses reprises un grand facilitateur.


Jour 1 sur la Cassiar, nous avons rencontré 4 bretons, JB, Laura, Nolwen et Rémi, 4 cyclovoyageurs comme nous. Nous avons roulé ensemble une après-midi puis, à 6,cherché un logement potentiel et gratuit. Ça nous a rappelé les hikes aux scouts. Norma, une première nation, nous a gentiment hébergé dans une cabine en bois que son mari est en train de rénover.

Le lendemain jour 2, on les quitte et le soir, on rencontre sur un site de camping gratuit 2 américains, Glen et Brandt, qui nous offrent un verre de vin et nous donnent pleins de conseils pour la route aux usa.


Jour 3, midi, en atteignant Dease Lake, le seul point de ravitaillement sur la route, on suit les conseils de nos amis français et on fait.. Les poubelles du petit supermarché! Ça marche bien, on y trouve des framboises, myrtilles et oignons en bon état, qu'on mangera le jour même pour ne pas trop attirer les ours qui en raffolent.

En fin de journée, quand vient le temps de trouver un campement, on tombe sur une affiche indiquant un festival gratuit où tout le monde est le bienvenu. Et quel type de festival sera notre premier festival au Canada ? Un festival de gospel!! :) on y a été reçu comme des rois, avec souper, douche, petit déjeuner, full full full desserts. On doit l'avouer, on s'est goinfré, on en est même un peu gêné et sommes repartis avec des pâtisseries plein les sacoches. Mais la nourriture n'est pas tout, on y a fait de belles rencontres, eu de bonnes démonstrations d'amour et d'hospitalité et passé un très bon moment. On repart de là seulement le lendemain vers 13h, après avoir assisté au service, bien plus vivant que chez nous, et avec plein d'adresses où s'arrêter dans les semaines à venir.

Jour 4, ce n'est pas fini les rencontres. Ce soir c'est 4 retraités de Vancouver, Boyd, Leslie, Bob et Margaret qui nous accueillent sur leur emplacement de camping, nous proposent une bière et au final, nous invitent à souper et nous prépareront le déjeuner le lendemain !

Jour 6, la fameuse journée des records (121km et 11 ours) qui n'avait pourtant pas si bien commencé. On s'était réveillé sous la pluie, de l'eau plein la tente, remballé toutes nos affaires encore mouillées et entourés de moustiques. Et qui retrouve-t-on le soir ? Nos 4 chers français, avec qui on passe la nuit dans une maison abandonnée cette fois.

Jour 7, on fait un crochet de 65 km pour passer à Stewart, en bord de mer. On nous a vanté la beauté de la route jusque là et on ne nous a pas menti. De part et d'autre de la route, des glaciers, des cascades, c'est magnifique.

A Stewart, on retente notre chance à l'épicerie, cette fois-ci on adopte une nouvelle technique: on demande à la vendeuse si elle a des produits périmés et ce qu'elle en fait. Et on se retrouve à parcourir les rayons juste avant la fermeture en cherchant les dates de péremption de chaque produit. Et c'est les mains remplies qu'on sort de là avec les produits périmés acquis gratuitement.

Jour 8, on avoue ne pas être mega chaud refaire les 65 mêmes kilomètres de la veille dans l'autre sens, même si la route était magnifique. On remonte donc en stop jusqu'à la jonction (et oui, le stop avec 2 vélos, ça marche ! Nos amis français y arrivent même à 4 et 4 vélos, respect !). De là on continue notre route vers le sud et devinez qui a choisi le même endroit que nous pour passer la nuit ?! Nos voisins français eheh.

Enfin, jour 9, on prévoit une grosse journée : on compte rouler 110km pour arriver chez un warmshower et y passer la nuit. Le matin, on enchaîne 60km jusque Gitanyow, un village de first nations. On est le 21juin, jour de l'aboriginal day. Quand on arrive là, les enfants sont en train de décorer leurs vélos en noir, blanc et rouge, les couleurs du clan. On nous propose de décorer nos vélos nous aussi et d'aider les enfants à faire les leurs. Et de fil en aiguille, on se retrouve à faire la parade avec eux et ensuite, à participer à leur buffet. On aime beaucoup cette liberté et flexibilité que nous offre notre voyage : on pensait rouler autant et arriver à tel endroit? Mais on rencontre quelqu'un et nos plans changent, on se laisse porter, on voit où ça nous mène. Dans ce cas, à Gitanyow, on est finalement restés là toute la journée et le soir, ils nous ont ouvert le centre médical pour qu'on puisse y dormir.

Lors des festivités non seulement on a (encore) mangé comme des rois, notamment du saumon péché et fumé par eux, mais on a pu participer à quelques activités. On peut entre-autre vous parler du concours de "eeeh hi". Ceux qui le souhaitent peuvent prendre le micro et faire leur plus beau "eeeh hi" qu'ils peuvent, ensuite le public choisit le gagnant. Cette année le gagnant aura été... Thomas! Manon quant à elle gagnera un prix à la tombola (le genre de truc qui t'arrive jamais) !


Pour la petite anecdote, en fin de journée, alors que tout le monde part, Thomas ne voit pas Manon revenir des toilettes. Il s'inquiète de savoir si tout va bien, qui sait on a tellement mangé que peut être elle ne se sent pas bien.. Il va donc voir dans les toilettes des femmes. Tout va très bien, Manon était en train d'y faire une séance de kiné improvisée à une dame du village ! Tout le monde rentre chez soi, plusieurs personnes nous remercient d'avoir été là. Ce n'est pas la première fois que cela nous arrive. Nous on ne comprend pas vraiment, c'est plutôt à nous de les remercier !!!


Pour la parenthèse culturelle, on trouve ça intéressant de passer la journée avec des premières nations disons contemporains. De notre point de vue, on a l'impression d'un mix entre le mode de vie occidental (maison, voiture, habits, coca,..) mais en même temps, de la force des traditions. L'art, la musique, la danse traditionnelle y ont toujours une place importante, les enfants apprennent la langue du clan à l'école et les techniques ancestrales sont transmises par voie orale.


Jour 10, on termine la Cassiar highway et on rejoint un axe plus important, c'est le retour du traffic et des camions. Il commence aussi à y avoir un peu plus d'habitations.


Jour 11, journée... Gustative !

Le matin, Scott notre hôte warmshower nous prépare de bons pancakes ;

À midi, on passe chez Ellen, qu'on avait rencontré au Gospel Music Festival. Hamburger et muffins sont de la partie;

Enfin, le soir, on atteint Smithers où nous attendent Donna et Andrew, aussi de Warmshower, encore avec un bon souper et jacuzzi en plus ! Lors des derniers kilomètres, on a enfin vu le paysage changer un peu : ce ne sont plus des sapins à perte de vue, mais on voit des champs et des vaches pour la première fois !

Après tous ces kilomètres, on fait une pause de 2 jours chez ces derniers pour recharger nos batteries. Smithers est la deuxième ville la plus peuplée sur notre chemin (6000 habitants) et ça fait du bien ! En comparaison, Whitehorse (là où nous avons atterrit) est la ville de 25.000 personnes, soit 2 tiers des habitants du Yukon !


On sort donc de la Cassiar avec une flopée de contacts pour la suite du voyage et aussi, avec plus de nourriture dans nos sacoches que quand on l'a commencée ^^ Parfois on se dit "heureusement qu'on pédale" lorsque l'on fait le compte de tout ce qu'on a ingéré sur une journée.


Souvent, on se demande "Mais qu'est-ce qu'on a fait pour mériter ça ?". Dans un sens positif bien sûr, toutes ces rencontres inattendues, ces beaux moments, toutes ces attentions qu'on reçoit. Mieux ce serait trop n'est pas ?


Avec tout ça, on vous parle de notre voyage, nos rencontres mais vous vous demandez probablement comment ça se passe entre nous ? Eh bien c'est fatiguant... On pense trop souvent la même chose et si l'un ouvre la bouche pour dire quelque chose, parfois totalement hors contexte, l'autre pensait à la même chose un instant auparavant... Sapristi !


Pour terminer, on vous partage une phrase qu'on entend souvent et qu'on ne contredira jamais (ou alors il faudra se poser des questions) : "oh you are bikers, you should be hungry".